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Vie du tribunal
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Le tribunal administratif de Nice dresse un bilan d’étape très positif de l’expérimentation menée avec la Caisse d’allocations familiales des Alpes Maritimes (CAFAM) et le Département des Alpes Maritimes.

Le 25 mai 2023, le tribunal administratif de Nice, la Caf de Alpes-Maritimes et le Département des Alpes-Maritimes ont décidé de s’engager ensemble dans une expérimentation d’une année visant à promouvoir et développer le recours à la médiation en matière de contentieux sociaux.

Cette expérimentation prévoit de recourir aux services des deux médiateurs « ad hoc » du tribunal (Amaury Lenoir, Caroline Zuelgaray), qualifiés de « médiateurs juridictionnels », afin d’assurer des missions de médiation sur ordonnances du juge pour certains contentieux des aides sociales (prime d’activité, revenu de solidarité active, aides au logement, allocations de logement social, cartes mobilité inclusion, etc.). Un travail de repérage et d’orientation vers la médiation est ainsi assuré dès l’enregistrement d’une nouvelle requête soit par le juge administratif (proposition de médiation), soit par l’administration concernée (demande de médiation). Une proposition de médiation est ensuite adressée aux requérants, visant à recueillir formellement leur accord pour s’engager dans un processus de médiation. Ces courriers de proposition de médiation présentent l’opportunité d’un tel processus et ses modalités de mises en œuvre, notamment le médiateur pressenti - en l’occurrence le « médiateur juridictionnel ». Les requérants y répondent en renvoyant au tribunal un simple coupon réponse. En cas d’accord pour s’engager en médiation, le juge administratif rend une ordonnance afin de lancer officiellement le processus de médiation.

Le médiateur juridictionnel ainsi désigné peut alors engager le processus de médiation. Il s’agit pour lui de mettre au clair la situation, d’identifier les nœuds du litige, de comprendre les positions et les attentes des requérants comme celles de l’administration. Ce travail de préparation se fait généralement à distance, par le biais d’échanges de courriels ou d’appels téléphoniques. Une fois ce travail accompli, les parties se retrouvent au tribunal à l’occasion d’« audiences de médiation ». Là aussi ces audiences revêtent un caractère expérimental. Il s’agit en effet de mobiliser le médiateur, les représentants de l'administration et les requérants sur une demi-journée, durant laquelle une demi dizaine de situations (affaires) sont traitées. Chaque « affaire » bénéficie d’un temps de médiation d’une heure environ.

Les participants à ces processus de médiation (administrés et administrations) peuvent ainsi, avec l’aide du médiateur juridictionnel, se faire entendre, entendre l’autre pour, in fine, tenter d’aboutir à une solution susceptible de résoudre durablement et globalement le litige qui les opposait, en respect du droit et en considération du principe d’équité, fondamental en

médiation. En cas d’accord en fin de médiation, la procédure contentieuse, suspendue le temps de la médiation, prend fin avec un « désistement d’instance » ou un « non-lieu à statuer ». Les protagonistes évitent ainsi un procès et repartent satisfaits d’une communication rétablie, d’une compréhension réciproque et d’une solution « gagnant-gagnant ». Le tribunal, quant à lui, voit une affaire en moins à instruire, à audiencer et à juger.

A mi-parcours, le bilan de cette expérimentation est encore plus positif qu’espéré. En outre, depuis le mois de juin 2023 :

47 affaires ont été identifiées et proposées à la médiation et parmi elles :

 

  • 29 médiations ont déjà été ordonnées ;

  • 16 propositions sont en attente d’une réponse (accord ou refus pour engager une médiation) – il s’agit de propositions récentes (moins d’un mois) et de situations où les requérants sont difficilement joignables ;

  • 2 propositions ont été annulées – il s’agit là de situations où les protagonistes se sont rapprochés et ont trouvé une solution rapidement par elles-mêmes, rendant ainsi le recours au médiateur juridictionnel (et au juge) plus nécessaire ;

  • Aucune proposition n’a été refusée.

 

S’agissant des 29 médiations ordonnées et engagées :

 

  • 11 médiations ont abouti à un accord total, avec désistement d’instance (processus global compris entre 2 et 5 mois) ;

  • 17 médiations sont en cours ;

  • 1 médiation a échoué – le requérant présentait une fragilité psychologique importante rendant impossible toute discussion sérieuse et constructive.

Au final, les acteurs mobilisés et concernés par cette expérimentation en sont unanimement satisfaits. D’ailleurs, les résultats enregistrés surpassent déjà les engagements et objectifs fixés.

Ces litiges entre administrés et administrations font ainsi l’objet d’un traitement à l’amiable, plus souple, plus adapté, plus rapide, plus global et surtout plus apaisé. A ce jour aucune de nos propositions de médiation n’a été refusée, alors même que traditionnellement le tribunal enregistre un taux d’acception de ses propositions de médiation de l’ordre de 30% à peine, toutes matières confondues. Mieux, l’accueil réservé à ces propositions de médiation est généralement très enthousiaste : « Non seulement je vous dis OUI, mais je vous dis également MERCI pour cette proposition ».

Le fait de proposer aux parties l’intervention d’un « médiateur juridictionnel » qui, en sus de la gratuité de son intervention, présente de sérieuses garanties de compétence (dûment formé en médiation et en droit public), d’indépendance et d’impartialité, est un argument de poids pour amener les protagonistes à accepter de s’engager en médiation. Dans ces contentieux sociaux, les enjeux économiques sont souvent relativement faibles (quelques centaines d’euros en moyenne) rendant quasiment impossible le recours à un médiateur libéral, payant. De même, le recours au médiateur institutionnel ou territorial, lorsqu’il existe, n’est pas toujours envisageable en raison des textes qui régissent leurs interventions, en raison de leur indisponibilité ou en raison des réserves émises par certains requérants concernant leur impartialité et leur indépendance (malgré les efforts de la juridiction pour éclairer et rassurer les administrés sur ces questions).

Jusqu’ici tous les acteurs concernés - à l’exception d’une seule affaire (circonstances exceptionnelles évoquées précédemment) - sont parvenus grâce à la médiation à trouver une solution et à signer un accord mettant fin au litige qui les opposait, dans un délai assez court (entre 2 et 5 mois en médiation contre 6 à 12 mois au contentieux). Ce taux de satisfaction final, proche du 100% à ce jour, est très certainement l’argument majeur en faveur de cette expérimentation.

Au demeurant, la juridiction y trouve également son intérêt puisque ce sont là autant d’affaires traitées, bien souvent, plus rapidement et à moindre coût que par une approche contentieuse « traditionnelle ». Au surplus, les risques d’appel, de contentieux en cascade ou encore ceux d’exécution sont quasi inexistants.

Un bilan plus fin sera effectué au mois de juin prochain et les conclusions viendront nourrir les projets et ambitions « amiable / médiation » du tribunal, des ses partenaires médiation et plus largement, des acteurs du procès administratif.

Rappelons que pour l’heure « les juridictions administratives n’ont pas vocation à assurer ellesmêmes des missions de médiation ». Leurs missions et responsabilités actuelles se bornent à la promotion et la prescription de médiation.

Il s’agit ici, d’une expérimentation locale.

Pour tout renseignement complémentaire : amaury.lenoir@conseil-etat.fr